Denis me manque, je voudrais le voir ce soir. J'aurais dû lui demander son numéro de téléphone ou son mail ce matin. J'ai écrit mon adresse msn sur un agenda posé sur son bureau. Il m'a dit "oui, mais où sur l'agenda?", à quoi j'ai répondu "à la fin". Je ne suis pas sûr que l'adresse soit parfaitement lisible. Je ne connais que son prénom, mais je saurais retrouver son adresse en retournant dans sa rue.
Huitième étage sans ascenseur, entre six et sept heures du matin, et le corps à corps reprend, il me mord les seins, j'ai encore mal, je le mords aussi, les bras et le cou, je n'en peux plus, il dansait seul et on s'est regardés, ses yeux presque de fille et son visage aussi, sa peau noire, sa silhouette fine et musclée, le débardeur blanc moulant sur la peau noire, le jean large et ma main sur son sexe à travers la toile, je ne savais plus si nous dansions ou si nous faisions l'amour, je l'ai pris là, presque, il y avait d'autres couples autour de nous, je ne voyais plus rien, que lui et la musique dans nos corps, et l'alcool dans le sang aussi, les sexes dressés au dessus de la ceinture enfin, les caresses de la main puis de la langue à genoux l'un devant l'autre, puis la backroom et le sol humide, ses cris dans la musique maintenant étouffée mais toujours entêtante, les mecs qui regardent, qui restent ou pas, il se rhabille et je me demande si tout est fini, comme ça, mais non, on sort et on décide d'aller chez lui. Il craint ma réaction, sa petite chambre, les escaliers, j'imagine le tableau, je m'en fiche, je le veux, et c'est lui qui me prend, et nous dormons ensemble, moi dans ses bras d'abord, puis je glisse sous son aisselle, je suis sur le côté, le lit est étroit, mais je dors, deux heures sans doute, puis je pars, j'ai juste laissé mon mail, il a envie de me revoir, dit-il, il me dit au revoir, la porte est entrouverte, il est nu et il sourit, il y a ces photos de lui, encore enfant, déguisé, je ne sais plus en quoi, son sourire toujours, et je descends les escaliers, léger et engourdi, une marque sur la tempe gauche, un pli des draps qui a creusé un sillon, j'hésite à mettre mes lunettes de soleil, pour cacher ça, et la fatigue dans les yeux, la tête de celui qui a découché, et le maquillage aussi, qui tient, je le sais, j'ai vérifié avant de le quitter, et je me demande jusqu'à quelle heure il a dormi, s'il embrasse quelqu'un d'autre ce soir dans le même club ou dans un autre, et ce matin, son odeur sur mes doigts, j'étais encore plein de lui, et maintenant encore, le manque, de lui, rien que de lui, mon manque est fixé ce soir, et je suis épuisé, je n'ai dormi que deux heures ce matin, alors je ne me poserai plus de questions dans quelques minutes, et mes rêves seront à Denis, je veux l'amour dans mes rêves, et ses frissons et ses dents dans ma chair.