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Le pays - Page 11

  • La leçon

    ou LA DÉMOCRATIE DU COUTEAU — ou LE RÉGIME DÉTERGENT — Car non, ce régime n’est pas autoritaire. — Car oui, nous sommes protégés jusqu’à nouvel ordre. — Car oui, là, tout n’est qu’ordre et hygiène. — Ionesco indique, à la fin de la pièce, que la bonne met un brassard nazi au professeur. — Quand j’ai joué la bonne, on a choisi de ne pas l’utiliser. — La didascalie paraissait redondante. — Depuis 40 jours, les discours ont pris le tour absurde de La Leçon. — On ne sait qui, du professeur R., du président M. ou du président T., tient le rôle principal, et nous sommes tous de bons élèves, et l’on sait comment cela se termine.

     

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  • Homo detritus

    Sortir sous couvert d’un bout de papier et de la nécessaire nicotine, marcher courbe en improvisant quelques détours sous le soleil insolent, observer les gants poussés par le vent contre les pierres d’une jardinière urbaine, déchiffrer l’emballage d’une salade industrielle au poulet confiné malgré son nom de dictateur : documenter les déchets de l’époque qu’on appelle volontiers anthropocène ou capitalocène — mais poubellocène et plus encore poubellien lui vont comme un gant.

     

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  • Le bonheur est toujours un échange

     

    ou 

    dans les choux

     

    ou 

    la pute, la danseuse et la reine

     

     

    Avant d’aller au marché, j’ai scrollé les actualités sur Facebook : des stylos rouge sang, un nouveau mensonge d’arracheur de dents du ministre de la santé, des publicités pour des masques chirurgicaux à acheter par lots de cent, et d’autres, plus sophistiquées, pour des masques urbains prêts à se fondre dans le chic du premier costume déconfiné, et des visières, casquettes-visières, chapeaux-visières, bobs-visières, visières anti-UV aux bruns dégradés qui vous protégeront élégamment dans les rues infectées comme le ferait la vitre teintée du plus désirable SUV. — Puis ce témoignage d’une femme qui travaille dans un centre d’écoute téléphonique, elle relatait les appels de détresse des prostituées du Bois de Boulogne, une jeune fille de l’Est, le pays n’était pas précisé, elle était arrivée en France à l’âge de quatorze ans, j’aimerais me souvenir de son prénom, elle n’avait pas vu son maquereau depuis le début du confinement, il ne l’avait pas payée, elle continuait de faire des passes, n’avait plus de toit, dormait dans le bois, se lavait avec des bouteilles d’eau, elle toussait au téléphone, certains clients portaient un masque, lui en donnaient, l’un deux lui en avait même confectionné un avec du papier toilette, la plupart s’en passaient, et puis une autre fille avait appelé, la première était morte, le corps immobile dans une allée du bois, elle est morte hier, et quelques minutes après que j’ai partagé ce témoignage, le post a disparu du réseau, je l’ai recherché sur la page de l'ami qui l’avait partagé quelques minutes avant que je le partage à mon tour, il n’y était plus non plus, juste ce message indiquant que le contenu avait dû être supprimé par la personne qui l’avait initialement publié, mais pourquoi ? Les prénoms de ces filles qui les exposaient, le risque d’une descente de police, la surveillance orwellienne du réseau ?*

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