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folie minuscule - Page 91

  • Devant la Fontaine des Innocents...

    Devant la Fontaine des Innocents, il y avait trois jeunes filles drapées de noir, ombres vivantes des naïades qui depuis cinq siècles ornent le monument immuable au milieu des métamorphoses de la ville.

    Cette pierre calcaire arrachée aux carrières souterraines est agglutination de fossiles microscopiques, millions de vies minuscules figées dans le silence de millions d’années, au hasard de la lumière d’un plus jeune soleil, de la dérive lente des continents et du vent qui les y déposa : foule inerte et innombrable qui nous précède.

    Les hommes en firent de tendres offrandes aux dieux et aux rois. On y tailla des pierres grossières et de complexes drapés d’où surgirent des chairs si tendres qu’on les rêve tendres éternellement, et plus tendres encore que celles de ces jeunes filles de noir parées — qui pudiquement voilent les leurs.

  • Fruité de la diction

    Dans Mise en scène de Phèdre, Jean-Louis Barrault rapporte une "anecdote qui décrit Racine arpentant les jardins des Tuileries tout en composant à haute voix, tournant autour des bassins, se tordant les mains, se lamentant si bien que les jardiniers attirés par tant de détresse apparente, crurent qu’ils avaient devant eux un désespéré qui voulait se jeter dans le bassin". J’ai noté quelques autres passages, comme la prononciation, au XVIIe siècle, d’un ch doux pour "Achéron", la diction qui est plus dense quand les liaisons sont utilisées "avec économie", les liaisons qui "amollissent" et "ternissent" les voyelles: "La diction devient uniforme et grise. Elle perd son fruité et sa couleur." Et ceci, encore: "Il tentait la synthèse de l’élégance, de la noblesse et du naturel dans un registre qui n’était ni le chant, ni la prose".