Il faut penser chaque jour à la mort pour ne pas la craindre. Plutôt: y penser chaque jour n’est pas crainte de la mort. Mais je n’y pense pas. Pas de cette façon en quatre lettres. Pas cette abstraction qui est un artifice du cerveau humain. La mort ne m’est concevable qu’attachée aux vivants que je connais, de près ou de loin, et aux morts dont j’ai éprouvé la perte: ce qui fait deux expressions poétiquement embarrassantes.
J’ai lu et chanté le premier poème du recueil, qui commence par un vers latin et fait rimer la gloire du monde et l’abeille, la pompe et le volatile: "Sic transit Gloria Mundi / How doth the busy bee." Cette langue habite un monde qui me plaît tant que je la veux pour seconde langue maternelle.
On parle aussi de secondes noces, par cet archaïsme du français où subsistent quelques ruines bizarres au milieu de l’ordinaire et d’une camelote qui miroite et se démode. On passe le plus souvent sans regarder, comme l’on circule sur une route accoutumée sans rien remarquer du paysage ni de l’épaisseur du brouillard.